À l’heure où les sondages assurent que les Français ont un rapport plutôt sage à l’amour, l’infidélité n’a jamais été aussi bankable aux États-Unis. Entre les agences de testeuses de fidélité et les cabinets qui parrainent l’adultère, un vrai business est né.
Paru le 20.08.2009, par Marion Galy-Ramounot (Figaro)
Dépassé le temps où l’on épiait ses textos et fouillait ses poches pour le prendre en flagrant délit d’adultère. Dans le roman de Jessica Brody, Confidentialité assurée, des femmes suspicieuses louent les services d’une testeuse de fidélité.
« Avant de devenir écrivain, je travaillais dans la finance, entourée d’hommes. Lors de sorties entre collègues, j’ai souvent vu des hommes mariés flirter – et plus – avec d’autres femmes. J’aurais aimé dire la vérité à leurs épouses, mais je ne pouvais pas, évidemment. » Jessica Brody a donc choisi la plume comme exutoire à son indignation ; son premier roman raconte l’histoire de Jennifer, employée de banque le jour et testeuse de fidélité la nuit. Sous le nom de code Ashlyn, elle est missionnée par des femmes en proie au doute pour « tenter » leurs maris jusqu’au passage à l’acte.
Le plus fou, c’est que la romancière ignorait que cela existait réellement, que des agences spécialisées dans l’espionnage matrimonial sévissent déjà en Grande-Bretagne et aux États-Unis. Basée dans le Worcestershire, Honey Trap Agency – comprenez « l’agence à piéger chéri » – est la plus populaire. Sur son site, on peut lire : « Si vous suspectez votre mari de vous tromper, nous avons nombre d’agents très séduisants qui seront à même de tester la fidélité de celui-ci. » La Londonienne Expedite vous propose de « choisir vous-même le détective qui vérifiera le degré de fidélité de votre conjoint. Enregistrements à l’appui. » Aux États-Unis, Sandra Hope, fondatrice de Mate Check Private Investigations, se fait appeler « The Love Detective ».
Love detective, love decoy (« appât »), testeuse de fidélité, honey trapper (« piégeuse à chéri »)… Ces agents pas comme les autres ont beaucoup d’appellations, mais toujours la même stratégie. Dans le roman de Jessica Brody, le personnage d’Ashlyn campe une femme fatale, irrésistible. « Je porte souvent un tailleur-minijupe noir, des escarpins Manolo Blahnik, noirs eux aussi… et pas de bas, peut-on lire page 10. J’ai baptisé ce look “cadre et pétasse”. C’est assez chic et convenu pour que les hommes vous prennent au sérieux, et assez olé-olé pour qu’ils comprennent que vous aimez bien vous faire remarquer. »
Dans la vraie vie, c’est… pareil ! Interrogée par The Daily News en 2007, l’Anglaise Nicole Tatler, honey trapper professionnelle, confirme que pour être efficace, il faut avoir beaucoup d’allure et de sex-appeal. : « Mon boulot consiste à m’asseoir à côté d’un homme dans un bar, faire en sorte qu’il m’offre un verre, tout mettre en œuvre pour le séduire et revenir avec la preuve qu’il peut être infidèle. Typiquement, cela se traduit par le fait qu’il va nier être marié, ou bien retirer discrètement son alliance, ou encore demander mon numéro de portable. »
Vont-elles jusqu’à coucher pour savoir s’ils sont vraiment capables d’adultère ? Non. Selon les informations divulguées à la presse anglophone quand ont émergé les premières agences de honey trapping, elles s’arrêtent juste avant, c’est la règle. Aujourd’hui, elles refusent de répondre aux questions. Redoutent-elles que l’on s’enquière de leurs tarifs ? Ou n’en ont-elles pas le temps, trop occupées à pourchasser les maris – et femmes – inscrits sur The Ashley Madison Agency, l’agence américaine en ligne d’aide aux rencontres extraconjugales ?