Je l’ai déjà dit, écrit, j’aime cet homme.  Son regard sur les femmes, les hommes, les animaux, la nature, la vie.  Sa part d’insoumis, de rebelle tendre.  Sa part de romantique aussi.

Il a compris beaucoup de choses en faisant confiance à son instinct, à son destin.  En ne laissant rien au hasard car c’est un peaufineur déguisé en bohême.  Le contraire du n’importe quoi.

J’ai eu le plaisir d’être invitée à une avant-première de son 44ème film: SALAUD ON T’AIME.  J’ai été, encore une fois, éblouie par la manière dont il a fait son film, le choix des comédiens, la liberté des dialogues, la beauté des images, la musique qui prend juste la bonne place et donne des ailes.

Parlant d’ailes, il a mis un aigle au centre du film.  Ce n’est pas anodin.  Un aigle, c’est majestueux et fort, ça voit tout, c’est instinctif.  C’est le seul oiseau qui peut voler dans la tempête.  C’est un emblème, une référence.  Et il s’en sert comme un Maître.  Pour dire des choses sans les dire.  Pour écrire l’histoire au deuxième degré.  Le regard de Johnny n’est pas étranger au choix, certainement, même si on l’a toujours comparé au loup.  Mais choisir un loup aurait été prévisible, or ce film est loin d’être prévisible, justement.

Parlons de Johnny!  Il est parfait, totalement crédible, à la hauteur du personnage: beau, sensible, baroudeur en pause-café.   Le regard qu’on posera sur lui ne sera plus jamais le même après ce rôle-la.  Fini les sourires en coin!  Johnny est un acteur, un vrai.  Ne lui avait manqué que le révélateur – terme photographique – qu’est Lelouch, c’est chose faite. Et c’est totalement réussi.

Et le décor, la montagne si belle, cette maison qui fait rêver et ce je-ne-sais-quoi de totalement français copain-famille qu’on ne retrouve que là-bas.   Quelque chose dans les sentiments qui n’ont rien d’américain, même si l’Amérique est présente autrement, comme revue et corrigée avec un Eddie Mitchell en mode Dernière Séance.  Leur duo est un grand moment de cinéma signé C.L.  Il en a quelques uns à son actif.  (Voyez vite D’UN FILM À L’AUTRE tourné pour ses 50 ans de cinéma, voix off commentée par lui.  Du grand Art.)

Les autres comédiens sont aussi parfaits, de belles découvertes pour moi.   Mais, mais… j’ai une petite réticence pour Sandrine Bonnaire dont j’admire le talent par ailleurs.  Je trouve que le couple-cinéma n’est pas crédible,  je trouve qu’il y a un mur entre eux, quelque chose d’impossible dans la vraie vie.  Même s’ils s’embrassent de manière assez convaincante! Même si son sourire est lumineux, je doute de cette chimie-là.  Elle est trop simple, trop ordinaire pour lui.  Même si c’est le repos du guerrier, il me semble qu’il aurait pu tomber amoureux d’une autre, plus charnelle, plus animale, plus près de lui.  Je cherche un exemple: Marie-Josée Croze? Anne Parillaud?  Mais c’est du cinéma, n’est-ce pas, alors…

Et les dialogues!  Que dire de ces petites phrases échappées entre deux regards, qui laissent la spectatrice que je suis en apesanteur: « Si les femmes font les premiers pas, c’est qu’ elles veulent le dernier mot » ou « les chansons, ce sont des poèmes qui prennent l’air »  Ah!  Excusez si ce ne sont pas exactement les mots justes, je les ai attrapés au vol, mais c’est l’esprit du « mot » en tout cas.

J’aimerais relire tous les scénarios pour ne relever que ces petites phrases-là et en faire un livre.  Tiens, c’est une idée à la Lelouch ça…  Ne prend-on pas la couleur de ce que l’on aime?

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