She was friend with McQueen and is to most of the Couture world. She is a Muse. A larger than nature, real-life legend. Unique. Here is some photos and an article in French that resumes it all.
Article du Figaro Madame:
Elle est la plus extravagante, la plus surréaliste, la plus inclassable des égéries. Héritière milliardaire au pedigree haut en couleur, elle a fait de la mode son terrain de jeu et d’expression. Rencontre avec la piquante ambassadrice des montres de luxe Roger Dubuis.
Et si Daphne Guinness s’était trompée de destin ? Plutôt que d’être la designer, la muse, l’artiste, l’extravagante, l’héritière de la famille Guinness, richissimes brasseurs irlandais, puis de la famille Niarchos, puissante famille d’armateurs grecs, n’aurait-elle pas plutôt dû être vétérinaire pour fourmis ou dompteuse de cigales ? « J’aurais pu. J’étais sur la bonne voie », murmure-t-elle dans son propre sabir, mélange d’anglais oxbridgien et de français façon Birkin, exquis comme le savant fouillis d’un mixed border, où les roses Duchesse côtoient les orties blanches. « À Cadaqués, pendant les vacances d’été, je faisais déjà des élevages d’escargots. Je leur chantais des chansons, je leur fabriquais des maisons. C’était tellement… cool. » Pendant ce temps, la mère de Daphne prenait le soleil avec Dalí, préparait des salades de courgettes avec David Hockney, et Man Ray immortalisait le tout. « Ils venaient tous se cacher dans notre monastère. Personne ne pouvait y accéder. La route était difficile. » L’enfant cultive déjà ce profil secret, mélange d’intensité, de timidité, d’autodérision mélancolique, qui sied à ceux qui ont l’extrême politesse de faire comme si rien de ce qu’ils vivent n’est anormal.
Et pourtant rien n’est tout à fait ordinaire dans cette famille baroque qui adore mélanger les extrêmes. Il y a le père, le baron Jonathan Guinness, la mère, Suzanne Lisney, une mannequin française, Jessica Mitford, la tante communiste engagée dans les Brigades internationales pendant la guerre d’Espagne, mais surtout la grand-mère adorée, Diana Mitford, divorcée de Bryan Guinness, mariée à Oswald Mosley (le fondateur du parti fasciste anglais) lors d’une brève cérémonie célébrée à Berlin dans la maison de Goebbels avec… Hitler comme témoin. Rien que ça ! « Lorsque je demandais à ma grand-mère : “Mais granny, comment avez-vous pu ? Le nazisme était l’abomination absolue, le plus monstrueux des crimes.” Elle me répondait tristement : “L’amour, ma petite fille, l’amour… J’étais folle de cet homme.” »
« Je mets ce qui me tombe sous la main »
Elle était faite pour les monastères espagnols calcinés de soleil, les châteaux en Irlande, se déguiser et jouer au garçon manqué sur les terres de ses ancêtres. Mais le sort en décida autrement lorsque Daphne rencontra, sur les pistes de Gstaad, Spyros Niarchos, héritier de l’empire fondé par son père, Stavros. Elle a 18 ans. Un an plus tard, elle l’épouse. La deuxième partie de sa vie commence. Elle durera quatorze ans. Daphne devient mère de famille, épouse docile et silencieuse, qui parcourt la planète en tutoyant les anges sur les fuseaux horaires entre l’île de Spetsopoula (résidence privée de la famille), Londres, New York, Paris et Saint Moritz. Une vie à la Jackie O, comblée par la naissance de trois enfants et par des diamants gros comme le Ritz. Elle est riche, de plus en plus riche.
La mode, c’est un morceau de vie
Que fait-on quand on possède tant d’argent ? « Je ne sais pas. Moi, je m’évadais dans mes univers. La vie ne tournait pas autour du shopping, mais autour de la santé de l’empire maritime construit par mon beau-père. » Daphne s’ennuie un peu. Daphne lit énormément. Daphne finit par divorcer pour retrouver son clan de farfelus londoniens, dont le pilier, Isabella Blow, rédactrice au Tatler, vient de découvrir Alexander McQueen lors de son défilé de fin d’études au Central Saint Martins College of Art&Design. Daphne apprend enfin à dessiner sa liberté et, quand il s’agit d’inventer son propre langage, c’est dans la fripe qu’elle le trouve. « Mon truc, ce sont les chiffons, les tissus, les rubans, les strass, les plumes, les chapeaux, les broches, les ceintures, les chaussures, les voilettes. Bref, tout ce qui fait que l’on peut s’amuser en s’habillant. »
2011 au musée du Fashion Institue of Technology à New York, on trouvait 70 chapeaux, 450 paires de chaussures, 200 sacs, 250 robes. « Pour moi, le vêtement est un moyen de vaincre la solitude, d’affirmer sa singularité, de lutter contre la dictature du prétendu bon goût, de retrouver une tribu et de s’exprimer. Finalement, ma mode est ce qui ressort d’un shaker dans lequel j’ai mis de la musique, de la littérature, de la mélancolie ou de la joie. Il en ressort une attitude qui est l’air du temps. La mode, c’est un morceau de vie. » Daphne Guinness fait danser les styles. « Je mets ce qui me tombe sous la main. » Vérifions. En ce petit matin d’automne, dans sa suite du Claridge à Londres, elle porte un pantalon noir en cuir stretch et une petite veste bleu nuit tissée de fils d’or très Oleg Cassini, ornée aux épaules de deux clips argentés. « Tellement commode avec son Zip façon anorak, explique Daphne. C’est le confort qui guide mes choix. » La preuve : ses chaussures. Des chaussures sur mesure réalisées par le bottier Massaro, mélange de pointes de petits rats de l’Opéra, d’échasses et de chaussures orthopédiques. « J’en ai de toutes les couleurs. Ce sont des chaussons. » Pour le montrer, elle s’élance dans la pièce, sautant comme un cabri, faisant des pointes, tourbillonnant comme une marionnette.
Un mix de Kate Moss et d’Audrey Hepburn
« Vous rendez-vous compte de l’intérêt majeur de ces chaussures ? Elles permettent de ne pas se prendre le talon dans les grilles des stations de métro. » Madame Guinness prend-elle souvent le métro ? « Well, s’il le fallait, of course. » Et les bagues en diamants à tête de mort qui ornent chacun de ses doigts, comme si elle avait enfilé les mains d’une armure ? « Un hommage aux Hells Angels, que j’adore, et aux figures gothiques, dit-elle en passant ses mains dans ses cheveux noirs et blonds de Cruella d’enfer. Je suis une romantique de l’époque grunge. » Son grand ami était Alexander McQueen. « Il me manque tellement. Avec lui, la mode est devenue de l’art. Sa façon à lui de parler à la fois de sexe, de mort et de politique était unique. Je pense que c’est cela qui touchait les gens. En plus, il connaissait tellement bien les techniques de confection qu’il pouvait se permettre d’être subversif. »
Je mangerai quand je serai morte
Daphne Guinness est un mix de Kate Moss et d’Audrey Hepburn. D’un côté, une chevelure bicolore de punk londonienne ; de l’autre, le regard étonné et sincèrement givré de l’héroïne de Breakfast at Tiffany’s. Le tout corseté par un maintien irréprochable de danseuse disciplinée. Chez elle, on boit du thé, que du thé, et des boissons à l’açai. Comme les boas, elle doit manger une seule fois par semaine. Peut-être un petit pois ? Certains disent qu’ils ont toute la mort pour maigrir. Elle dit exactement le contraire. « Je mangerai quand je serai morte. » Chez Daphne G., l’excentricité ne tue pas l’élégance.
Elle la sublime et surtout la dédramatise. « Il faut bien s’habiller, non ? La loi l’impose. Nue, vous allez en prison. Alors, pourquoi ne pas s’en amuser ? » Elle porte trois montres à son poignet pour avoir l’heure de New York, Londres et Paris. Des montres de luxe Roger Dubuis, dont elle est l’égérie. Elle en aime les angles polis, les flancs étirés et le mécanisme presque apparent qui lui rappelle la voûte céleste. L’une est sertie de diamants, l’autre est en or gris et la troisième, en titane. Ça ne l’empêche pas de porter des collants filés. « C’est exprès, mon côté grunge. » Elle se fiche des critiques, s’aime comme ça, vient de s’installer à Paris, sous les toits, face à la Seine, pour être plus proche de son cher ami Bernard-Henri Lévy. En est-elle amoureuse ? « Cela semble évident. » Elle vend son appartement new-yorkais de 1000 mètres carrés à cause du voisin du dessous, qui lui a demandé 1 million de dollars de dommages et intérêts après un dégât des eaux qu’elle a occasionné en laissant couler son bain. « Il paraît que ça l’a traumatisé. » Comme dans Breakfast at Tiffany’s, où Audrey Hepburn rendait fou son voisin du dessus…